La mairie de Decazeville et Decazeville-Communauté souhaitent accueillir en septembre prochain une course automobile sur terre dénommée « 1er rallye Terre de Découverte » sur le site de « La Découverte » à Decazeville, proche du centre-ville.
Signez la pétition du Collectif pour l’interdiction d’une course automobile sur le site de « La Découverte » à Decazeville pour l’interdiction de la course automobile « Terre de Découverte » et plus généralement l’interdiction des activités mécaniques sportives et de loisirs sur le site de La Découverte à Decazeville.
Ce site est une ancienne mine de charbon à ciel ouvert dont l’exploitation a cessé en 2001. Depuis, elle a été mise en sécurité et réhabilitée grâce à une collaboration étroite entre Charbonnages de France et les collectivités locales. Les pentes de cet espace grandiose ont reverdi grâce d’abord par l’apport de semences sélectionnées pour se développer sur ces sols anthropisés, mais une végétation naturelle s’y est aussi rapidement installée. La faune des alentours a agrandi son périmètre d’habitat et de nouvelles et nombreuses autres espèces s’y sont installées.
Un important lac est situé en son centre, alimenté par la remontée des eaux souterraines dont le niveau a été stabilisé à un certain niveau afin de ne pas ennoyer le bas de la ville. Les eaux superflues sont pompées et évacuées vers le ruisseau Riou-Mort proche et participe ainsi à l’alimentation de ce ruisseau, notamment lors des étiages en été.
Des mares temporaires alimentées par les eaux de ruissellement, notamment les mares situées à l’entrée de ce site côté centre-ville à Cantagrel, constituent une importante zone humide permettant de lutter contre le réchauffement climatique et le phénomène d’ilot de chaleur. Elles favorisent également la reproduction de nombreuses espèces d’insectes, d’amphibiens, d’oiseaux… Un réseau de noues et de bassins de récupération des eaux de pluies participe également au maintien de cette biodiversité.
En un peu plus d’une vingtaine d’années, « La Découverte » est passée d’un espace totalement artificiel à un espace naturel, certes encore très fragile, où l’on peut pratiquer la randonnée pédestre, le jogging, le vélo, des activités douces de loisirs… ou tout simplement dédié à la promenade familiale ou à l’observation de la nature. Ce parc est d’ailleurs très fréquenté par toutes ces catégories d’usagers.
Favoriser une course automobile sur les chemins de ce parc intercommunal est tout simplement impensable… et même d’ailleurs impossible car le site est « interdit à tous véhicules à moteur » comme l’indique fort justement un panneau à son entrée.
Les chemins de ce site ont été réalisés lors du chantier de réhabilitation du début des années 2000. Ils sont constitués de remblais venant des activités minières et sidérurgiques contenant des matériaux qu’il vaut mieux ne pas trop remuer du fait de leur possible toxicité : mâchefers, hydrocarbures…
Nous avons malheureusement déjà eu à vivre ce genre d’activité mécanique les 19 et 20 août 2016 lors d’une étape de la course moto « Aveyronnaise Classic ». Le nuage de poussières engendré par le passage répété et à grande vitesse de motos s’est déposé sur tout le site, touchant les eaux du lac, les zones humides, la faune, la flore, les spectateurs… Le nuage de poussières s’était même déplacé au-delà du périmètre du site, touchant les riverains et la ville entière.
Avec cette course de véhicules automobiles, les retombées de poussières seraient beaucoup plus importantes. Un « teaser » mis en ligne par les organisateurs de cette course montre l’énorme nuage de poussières et la projection de terres chargés en matériaux résultant de l’activité minière avec le passage d’une seule voiture (https://www.youtube.com/watch?v=QwVuGltmF9Q&fbclid=IwAR2Wc1uTaVj723SmrF5lowfTHqDG_HsvpZ-AF5Q-hmbJthtAbG_Qg-geRbk
Imaginons un instant le passage de centaines de voitures !
Plus généralement, comment des collectivités locales, qui devraient montrer l’exemple, peuvent-elles encore favoriser de telles « animations » néfastes pour le climat, polluantes pour l’air, l’eau et les sols, consommatrices de carburants fossiles, destructrice de la biodiversité… alors que personne ne peut ignorer actuellement les effets dramatiques pour les générations futures du dérèglement climatique, de la perte massive de la biodiversité animale et végétale… et que l’on demande à tous des efforts pour économiser l’énergie ?
Avec cette course, c’est tout l’écosystème fragile mis en place depuis plus de vingt-cinq ans sur ce site grâce à la volonté d’élus et d’agents intercommunaux qui va être complètement détruit.
Le risque incendie sur ce site est déjà important, surtout en septembre où la végétation est généralement très sèche. Cette course va accroitre ce risque avec la présence de véhicules motorisés et de spectateurs.
Les conséquences d’une telle course sur ces chemins sur la qualité de l’air ainsi que sur la santé des personnes ne sont absolument pas abordées par les organisateurs et les collectivités locales soutenant cette course. Son impact sur la faune, la flore, l’air, l’eau, les sols ne fait l’objet d’aucune étude, encore moins de questionnement.
La Cour de justice de l’Union Européenne constate régulièrement les manquements de la France à ses obligations en matière de qualité de l’air.
Le Conseil d’Etat a condamné l’Etat français en octobre 2022 à payer une somme de 20 millions d’euros d’astreinte pour n’avoir pas agi assez rapidement contre la pollution de l’air. Le Conseil d’Etat vient d’ailleurs de confirmer cette décision le 10 mai dernier (https://www.banquedesterritoires.fr/emissions-de-gaz-effet-de-serre-nouvel-avertissement-du-conseil-detat-au-gouvernement
Année après année, ATMO Occitanie constate dans la vallée Viviez-Decazeville une qualité de l’air médiocre avec des quantités de particules fines en suspension pratiquement identiques à l’agglomération toulousaine. Les rejets dans l’air ambiant local d’arsenic, cadmium, nickel, plomb et zinc sont relativement importants par rapports à d’autres sites industriels d’Occitanie (https://www.atmo-occitanie.org/sites/default/files/publications/2023-04/Métaux%20-%20moyenne%20janvier%20à%20décembre%2022.pdf
Un rapport européen de 2021 note le fort impact sanitaire des activités industrielles de notre territoire sur les enfants et les personnes âgées : « Nos résultats confirment l’existence de risques sanitaires significatifs tout au long de la vie pour les résidents des zones polluées (Viviez pour cette étude) par rapport à ceux des zones témoins (Montbazens pour cette étude). Nous constatons un poids inférieur à la naissance et un état de santé plus faible pendant l’enfance, ainsi qu’un risque plus élevé de maladies chroniques à l’âge adulte et une mortalité prématurée plus importante. »
Remettre en suspension les poussières des anciens sols industriels des chemins de La Découverte avec le passage répété de centaines de voitures représente un danger environnemental et sanitaire supplémentaire pour la population locale.
Les mesures de compensation évoquées par les organisateurs (véhicules d’encadrement électriques, bâches sous les véhicules, remise en « état » du site, plantation d’arbres pour compenser le rejet carbone…) tiennent de l’anecdote et du « greenwashing ». Elles ne compenseraient nullement les dommages environnementaux et sanitaires que causerait cette course sur le site fragile de La Découverte, sur les spectateurs et sur les habitants de Decazeville.
La compensation carbone par reforestation est plus un phénomène de mode qu’une mesure efficace de lutte contre le réchauffement climatique. Seuls les arbres arrivés à maturité après 20 ou 30 ans permettent de stocker le carbone efficacement. Le réchauffement climatique, c’est maintenant qu’il faut le combattre ! C’est urgent ! Quant aux dégâts occasionnés par cette course sur la faune, la flore, l’eau, les zones humides… ils seraient malheureusement nombreux et parfois irréversibles.
Le gouvernement a annoncé le 22 mai dernier une série de mesures pour réduire plus rapidement les rejets de gaz à effet de serre afin d’éviter une augmentation de 4°C des températures en France en 2100, qui s’appuie sur des efforts importants à réaliser par les entreprises, les collectivités et les particuliers. Les véhicules motorisés forment le premier poste d’émissions de ces rejets qu’il convient donc de réduire drastiquement en commençant peut-être par les émissions provenant d’activités pas réellement indispensables et surtout dommageables pour l’environnement et la santé.
Si l’on souhaite valoriser l’image de Decazeville et du Bassin et faire en sorte d’attirer de nouveaux habitants et de nouvelles activités, il y a sûrement beaucoup mieux à faire sur cet espace magnifique, fréquenté déjà par de très nombreux usagers locaux ou qui viennent parfois de très loin et qui ne souhaitent pas le voir se dégrader avec de telles activités.